dimanche 29 novembre 2009

859 - "Verre d'eau"

On l'appelait ironiquement "Verre d'eau".

Auguste était un vieil ivrogne sans nom.

Hydraté dès le lever avec la pire des piquettes, la matinée se terminait invariablement dans une noyade de tonnerre et de feu, la grosse gnôle prenant vite le relais des p'tits canons...

A travers cette voluptueuse agonie de sa conscience le buveur nageait, tour à tour hilare, hébété, larmoyant, dans ce qui semblait être son véritable élément : un univers sinistre d'amnésie tranchante et de gaité frelatée.

Soixante-cinq ans que cela durait. Une existence entière vouée à l'ivrognerie la plus crasse.

L'on s'étonnait d'ailleurs que "Verre d'eau" fût encore de ce monde après cette longue vie arrosée des pisses de Bacchus.

Mais il était solide l'Auguste ! Faut-il qu'il y ait un Dieu pour les assoiffés sans fond... Il est vrai qu'il avait survécu aux tranchées de la "14". A le voir ainsi, lamentable, abreuvé d'indignité, dégueulant son ivresse, qui l'eût cru ?

Après avoir traversé l'enfer de la Grande Guerre, qu'est-ce qui aurait donc pu l'abattre ? Pour ce passé héroïque on pouvait bien lui pardonner son vice, au vieil Auguste... Son statut de vétéran le maintenait malgré tout en estime dans le coeur de ses concitoyens navrés de le voir chanter ses "gnôleries" du matin au soir.

Lui, ne parlait jamais des tranchées. Soûl à toutes heures de sa vie, comment aurait-il pu tenir une conversation cohérente sur quelque grave sujet ? Même lors des commémorations annuelles, il recevait l'accolade du maire l'haleine chargée de tous les alcools du diable... Se souvenait-il encore au moins de sa jeunesse dans la boue des combats ?

"Verre d'eau" finit par mourir dans un dernier hoquet désespéré dédié à la vigne qui, depuis l'âge de vingt-deux ans, l'avait aidé à vivre.

A oublier surtout.

Il buvait comme un trou depuis l'âge de vingt deux ans... C'était en 1918, la fin de la guerre. Celui que désormais on allait bientôt surnommer malicieusement "Verre d'eau" venait d'être démobilisé. Vingt-deux ans et déjà toute l'horreur des tranchées dans le regard.

Pauvre "Verre d'eau" ! Homme pitoyable, misérable, lamentable, mais surtout âme sensible brisée en pleine jeunesse, nul ne saura jamais son secret d'ivrogne.

On inhuma bien vite le défunt sans famille.

Nul ne sut que ce sobriquet de "Verre d'eau" sonnait aussi juste chez lui, deux syllabes lourdes comme le son du glas, sombres tel le chant fatal de l'airain...

"Verre d'eau" : des sons clairs et sereins si proches des sons de l'enfer. Des sons qui, ironie du destin, rappelaient son drame, poignant.

Car le drame de "Verre d'eau" c'était...

Verdun.

mardi 24 novembre 2009

858 - L'esthète

Tendre avec lui-même, impitoyable envers ses amis, tiède avec ses ennemis, il déteste morveux, vacanciers, plèbe.

Et chérit la Beauté.

Chez ce faux misanthrope et vrai égocentrique bien éduqué, certes asocial, voire perfide mais d'une rare honnêteté intellectuelle, tout inspire la répugnance aux borgnes qui le jugent pour sa franchise.

Encensé par les gens heureux, lapidé par le vulgaire, le dandy plaît aux princes, déplaît aux manchots.

Et met tout le monde d'accord sur la noirceur de ses chaussettes.

Ses mains propres lui attirent l'animosité des salariés, sa particule les railleries des chômeurs, son éclat la méfiance des blanchisseurs.

Les félins sont les hôtes privilégiés de sa tour d'ivoire. Les femmes (des créatures) éprises de ce féroce aristocrate en ont d'ineffaçables souvenirs. Vous ne verrez jamais un fils de Cerbère sous le toit de ce sybarite. Pas même un adorable caniche : ennemi de tout aboyeur, le bel esprit que je présente affectionne la compagnie des bêtes intelligentes.

Et inodores.

Obsédé par la Camarde, horrifié par la beauté qui devient pourriture, Farrah Fawcett est son plus doux cauchemar. Il s'extasie en s'enivrant de bière sur sa lumière révolue, médite en bavant d'épouvante sur son sourire devenu ordure.

En passant de la gloire vénusiaque à l'horreur du tombeau, de la caresse de Râ au cloaque de la sépulture, du baiser des hommes à la morsure du ver, Farrah Fawcett a su, de toute évidence, percer la carapace étincelante de notre héros décidément aussi détestable qu'attachant...

Seul le sort des papillons le touche : il faut qu'un ange trépasse pour qu'il frémisse.

La destiné des éternelles chenilles le laisse insensible.

Charitable à l'égard des belles gens, altruiste envers les seigneurs (ses pairs et laudateurs), plein de bonté pour les bien portants, généreux avec la gent blanc gantée, il conspue les méchants matérialistes, les malhonnêtes malheureux, les béats "broutteurs" de certitudes locales.

Cet esprit élégant à la tenue vestimentaire négligée ne songe guère aux soucis domestiques : les étoiles changées en cendre, les siècles en néant et peut-être l'esprit en éternité, telles sont ses préoccupations quotidiennes.

Bien des lecteurs en lisant ce texte désigneront le firmament pour nommer cet astre manceau. D'autres dirigeront un doigt rageur vers la fosse pour mieux l'inhumer sous leur oubli.

Peu importe, l'esthète brille.

Tout comme le soleil avec ses rayons de vérité crue, il dispense ses bienfaits aux porteurs d'ombrelles et brûle les sots.

lundi 9 novembre 2009

TONY MUSULIN, HEROS DES MINABLES FRUSTRES !

Après avoir commis un acte de banditisme audacieux Tony Musulin est devenu en quelques jours l'idole des Dupont.

Voici ce que j'en pense !


Comment peut-on être admiratif envers un hors-la-loi qui vole l'argent des honnêtes épargnants ?

Personnellement je n'admire nullement un aussi sinistre individu qui pour des raisons purement égoïstes s'approprie des biens qui ne lui appartiennent pas.

Rappelons que voler une banque c'est ravir les fruits du labeur de milliers de probes travailleurs...

LAMENTABLE !

Le mythe du Robin des Bois est un mythe précisément. Les crapules estimables n'existent pas : une crapule reste une crapule. Qu'elle soit déguisée en Arsène Lupin ou ou clown, son fond demeure le même.

Un voleur (surtout de cette envergure : aussi gourmand que peu scrupuleux) est avant tout un voleur, autrement dit un lâche fuyant ses responsabilités et n'assumant pas sa condition citoyenne, l'adversaire de la Civilisation, l'ennemi du bien public et de la fraternité ayant veulement rompu le contrat social, et non une personne digne d'admiration !

Comme toutes les canailles de son espèce, Tony Musulin est un âne, un être socialement immature, une âme primaire. En volant la société c'est l'humanité entière qu'il vole, donc lui-même.

Peu importe que son vol ait été commis envers un établissement bancaire (que certaines personnes regardent -à tort- avec si peu de considération)... L'aspect impersonnel de son méfait n'est qu'illusion qui masque l'essentiel car, fondamentalement, en volant une banque il vole son frère.

Un vol est toujours commis contre son prochain.

Une banque est au service des hommes et en vertu de ce fait je ne vois pas en quoi voler ce genre d'entreprise serait moins grave que voler un individu isolé...

L'auteur de cette bassesse n'a même pas l'excuse de la pauvreté puisqu'il touchait un salaire enviable que ne gagnent même pas la plupart des travailleurs bien plus méritants et courageux que lui (1700 euros mensuels) !

Seuls les esprits faibles admirent les actes de banditisme.

Moi, c'est la droiture que je salue.

mercredi 4 novembre 2009

857 - Eloge du voile islamique

Symbole de soumission féminine à une cause archaïque pour les uns, ornement vestimentaire pour les -rares- oiseaux d'envergure dont je fais partie, le voile islamique (que personnellement j'amalgame au voile marial d'un point de vue esthétique) empêche ses détracteurs de dormir pour la simple raison que, par-delà les prétextes politiques et culturels invoqués, le voile signe l'honnêteté de la femme bien éduquée qui le porte.

La vertu d'une femme de nos jours est considérée comme une régression, une sorte d'attachement pathologique à des valeurs périmées, tant notre "progrès moral" a été bêtement associé à la liberté de faire tout et n'importe quoi.

Nos femmes dévoyées par les chantres de la débauche devraient être jalouses de la dignité de leurs soeurs musulmanes.

Et de leur force de caractère.

Le voile (librement choisi, cela va sans dire) est le dernier rempart de la culture musulmane contre les agressions morales du monde. Les femmes voilées non seulement sont dignes, mais aussi courageuses. J'admire, autant sur le plan esthétique que moral, les femmes qui décemment se couvrent afin de ne point offenser le Ciel en excitant les mâles de la Terre -faibles par nature- avec leurs appas.

Ce voile de pudeur sur leur corps, leur visage, est une seconde peau, chaste, qui honore leur âme.

Le voile non seulement garantit leur vertu mais encore les pare comme des princesses. Artifice sobre des femmes bien élevées, le voile islamique agit comme l'écorce saine du pin : il repousse la mollesse, le vice, la puanteur et leurs adeptes, mais attire les hommes de bien. Les premiers trouvent le voile rude, âpre, austère, voire grotesque. Pour les seconds, il est la plus noble des bures...

L'homme sans goût préfère la fanfreluche à la parure monacale et c'est pourquoi il raille le voile islamique, tandis que l'ami des Arts affectionne l'expression noble des mœurs féminines.

Le voile islamique est un signe de grande classe féminine.

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REPONSE FAITE A UN DETRACTEUR IRONISANT SUR CE TEXTE EN L'ASSIMILANT SOTTEMENT A L'APOLOGIE DE L'EXCISION

L'amalgame -même s'il est fait sur le mode ironique- entre voile islamique et excision est non seulement outrancier mais injurieux et il n'honore pas son auteur.

Je ne vois pas en quoi le port du voile islamique est une atteinte à la liberté et à la dignité de la femme... Bien au contraire ! Que reprochez-vous aux femmes voilées ? De coupablement subir le poids d'une tradition que vous estimez archaïque ?

Nous sommes tous, homme ou femmes, Blancs ou Noirs, jeunes ou vieux, conditionnés culturellement par quelque chose. A notre insu ou consciemment. Certaines femmes sont culturellement conditionnées par le string, d'autres par le voile, d'autres encore par leur carte bancaire...

Chacun est libre de porter string, voile, jeans, souliers vernis ou lunettes de soleil. Personnellement les femmes voilées dans la rue ne me dérangent nullement, pas plus que les porteuses de string d'ailleurs. Je reconnais toutefois que sur le plan personnel j'apprécie beaucoup plus la vue d'une femme dignement voilée que la vue d'une femelle aux moeurs dévoyées vulgairement parée (avec tous les codes contemporains de l'asservissement occidental aux causes mercantiles).

Mais là encore, je n'empêche pas les femmes de se vêtir ou de se dévêtir publiquement comme elles l'entendent.

Je n'obligerais jamais une femme à ôter son string, pas plus que je n'obligerais une musulmane à se dévoiler sous prétexte que la couleur de l'étoffe du string de la première ou du voile de la seconde ternit le drapeau tricolore. Selon mes critères partiaux...

Si vous ne voulez pas être offensé par le voile islamique, par les moustaches des machos ou par la tronche de votre épicière, c'est très simple : vous n'avez tout simplement qu'à élargir le cadre de votre regard sur les êtres et les choses. En un mot, monter d'un ou deux crans dans l'intelligence.

Vous vous sentez offensé par le voile parce que vous le voulez bien. C'est vous qui délibérément choisissez ce qui doit heurter votre sensibilité -artificielle- ou la caresser (car il s'agit ici bien entendu d'une sensibilité au voile non pas naturelle, non pas épidermique mais purement cérébrale, fabriquée de toute pièce par les médias, les hommes politiques, les conversations de bistrot).

C'est vous qui choisissez, acceptez d'être violenté par la vue du voile. Vous recherchez volontairement à recevoir ces coups que vous pourriez parfaitement éviter.

Dans les faits, aucune porteuse de voile n'a jamais agressé ses détracteurs.

Raphaël Zacharie de IZARRA